Quand nous étions enfants – années 50 – c’est sur ces bateaux – qu’on appelait pinasses – que nos pères naviguaient, les passerelles n’avaient pas encore de « balcons », marque des bateaux neufs, ils faisaient vieux, pourtant j’aimerai toujours ce bateau « Amzer Zo » « Y’a bien l’temps », je le trouve joyeux, il transporte pour un tour l’équipage et sa famille, c’est sans doute un dimanche, il va franchir la barre, aller côtoyer l’île de Groix et retour.
Ces bateaux, soit disant rapidement construits face à la demande d’après-guerre, ont pêché « à mer ouverte » tant les poissons avaient été laissés tranquilles pendant quelques années, le résultat des marées était homérique, en quelques années, les maisons se sont construites, les premières Simca et 403 ont été laissées négligemment devant les portes d’entrée, les télés allaient s’acheter sans regarder le prix, les enfants, ha çà non, ne seraient pas marins, ils iraient au collège pour travailler dans les bureaux à l’abri de la houle et du vent et si c’était à Paris, çà serait Paris! Les années continuèrent ainsi, encore augmentées par les saisons de thon, les enfants grandirent, s’éloignant des quais, des visites à leur père, à la fin le poisson peu à peu manqua, les bateaux restèrent au port de Lorient, les bruits des chantiers se firent murmures, le poisson se fit de moins en moins sentir, nos pères prirent leur retraité à 55 ans, juste au moment où leurs enfants se mariaient et se mettaient à vivre des vies définitivement coupées de ces ports et de ces bateaux si chaleureux.
